Thursday, July 26, 2007

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Ethique formative III
Vagabondage entre les neurosciences et l’éthologie

Jorge Moll et Jordan Grafman, tous deux neuroscientifiques au National Institues of Health ont tenté une expérience relaté dans le Washington Post du 28 mai 2007 : ils ont observé le cerveau de volontaires invités à penser à un scénario avec soit la possibilité de donner de l’argent dans un acte de charité soit de le garder pour lui-même. Les résultats montrent que les personnes généreuses ont activée une partie primitive de leur cerveau. L’altruisme ne serait donc pas lié à la raison, comme réponse du néo cortex, mais plutôt une fonction du cerveau primitif de l’homme. Les neurosciences contredisent les modernes où la morale est raisonnée d’une raison éclairée.

Si la morale est liée au cerveau primitif, elle renvoie à l’homme premier et donc au processus de l’évolution qui probablement à commencé avec d’autres espèces. L’éthologie trouve toute sa place. C’est ce que propose Frans De Waal « les dauphins, les éléphants, les canidés et la plupart des primates répondent à la souffrance et au malheur d’autrui. » ou Boris Cyrulnik « l’aide aux handicapés, le respect des rituels d’interaction, les offrandes alimentaires, les menaces contre l’intrus afin de protéger le faible, les conduites d’apaisement constituent, chez les animaux aussi, un être ensemble organisé pour la recherche d’un bien être commun ». Il parle même de « protomorale ». L’animal serait donc moral… Evidemment, il faut se méfier des raccourcis trop sommaires, avec deux écueils. Le premier est la critique de l’anthropomorphisme, c'est-à-dire transférer des caractéristiques humaines aux animaux. Le deuil de la baleine, s’il est bien fondé ne saurait être analogue au deuil de l’homme. Le second est que la protomorale ne saurait être généralisée à l’ensemble de l’espèce animale. Le cannibalisme n’est pas rare.

La morale a un fondement biologique et la base de ce fondement est l’empathie.

L’empathie est à l’origine un processus de projection des sentiments humains pour aujourd’hui devenir la connaissance d’autrui. L’empathie neurologique est une attitude émotionnelle à se laisser modifier par le monde d’un autre, auquel on est attaché. En éthologie, le malaise de l’animal observateur est provoqué par la souffrance de l’autre. Il s’agit d’une empathie cognitive où la mère primate par exemple exprime une mimique anxieuse en voyant que son enfant s’est coincé le pied. Quand le petit souffre du pied coincé, la mère est altérée par l’image de la souffrance de son petit. On peut parler de représentation puisqu’il s’agit chez la mère d’une « activité mentale qui rend présente l’image d’un objet » comme l’affirme Serge Lebovici. C’est bien la construction sensorielle d’images du petit agité qui émotionne la mère et non pas la douleur d’un pied coincé. Ce n’est donc pas le langage qui fonde l’empathie, mais l’émotion. Nous reviendrons sur cette idée. Cette aptitude a désorganisé son propre monde intime quand celui d’un proche est désorganisé constitue le point de départ, la base cognitive de la morale.

A ce point de l’analyse, nous pouvons réintroduire Emmanuel Lévinas et son « épiphanie du visage », la rencontre face à face, visage à visage me permet de répondre à l’autre en ce qu’il m’interroge sur ce que je suis. L’image de l’autre est une construction qui prend sens. J’ai besoin de l’autre pour faire naître ma nature profonde. Emmanuel Lévinas va plus loin lorsqu’il intitule en 1992 son livre, l’éthique comme philosophie première. L’éthique existerait avant toute philosophie, avant tout savoir. Il est troublant de rapprocher ses positions du travail de Marc Hauser chercheur à Harvard qui constatait que quelque soit les civilisations le processus moral est le même. Il suggère que la pensée morale est intrinsèque au cerveau humain et non à une culture. Sans tirer les auteurs à des rapprochements contre nature, les croisements existent. L’éthique lévinassienne est donc bien premier. L’éthologie ou les neurosciences ouvrent un éclairage particulier sur la place de l’éthique.

Et la formation… Quelles conséquences sur son éthique ? Si l’éthique dans une certaine dimension est liée à l’empathie et la relation à l’autre. La formation éthique doit avoir une dimension relationnelle forte pour exister. Il s’agit de comprendre l’autre, de le rassurer grâce à l’empathie et de lui permettre de se sentir dans sa dimension humaine pour coproduire ensemble une réponse professionnelle. La fonction de formation pour être éthique doit développer une qualité éthique d’échange et d’écoute. L’entretien professionnel par essence espace de rencontre entre deux hommes, le collaborateur et son manager N+1 peut être le moment de cette rencontre si les deux sont prêts à cette rencontre. Il s’agit de sortir de la fonctionnalisation ou de la chosification comme le dit Emmanuel Levinas pour entrer dans la rencontre. C’est au delà des masques du professionnalisme que la rencontre à lieu. C’est le lieu du réchauffement mutuel, on n’est plus seul dans son humanité et l’autre me nourri de sa présence. Aristophane ne disait-il pas que la formation ne consistait pas à remplir un vase mais à allumer un feu ? La formation est éthique dans le sens où elle allume le feu de la nature humaine, l’homme nature première de l’homme.

Qu’est-ce que ce vagabondage peut encore nous apporter ?

Jordan Grafman a démontrer qu’une composante autre entre dans la pensée morale, les émotions. Elles sont véritablement centrales à la pensée morale. Antonio Damasio corrobore ces travaux avec l’expérience suivante publié en mars 2007. Il observe des patients dont la zone de la moralité était endommagé, il arrive au résultat suivant : face à un dilemme moral, comme abattre un avion de passagers détourné par des terroristes avant qu’il frappe une ville importante, les patients semblent prendre leur décision sans angoisse. De même, les psychopathes ne sentent souvent aucune empathie ou remord.

Joshua Greene, neurologue et philosophe à Harvard, propose, suite à ces multitudes expériences, une explication. La morale, comme on l’a vu, résulte des activités de base du cerveau. Les décisions morales difficiles actives différentes régions du cerveau qui sont en conflit ou en concurrence entre eux pour imposer sa suprématie. En 2004, il a demandé à des volontaires d’imaginer qu’ils se cachaient dans la cave d’un village pendant que les soldats ennemis venaient pour tuer tous les habitants. Si un bébé pleure dans la cave, est-il juste de l’étouffer pour sauver le groupe ? Face à un tel dilemme le cerveau active différentes parties qui rentre en communication Joshua Greene parle de « concurrence ». Selon l’auteur la régulation ne se fait pas tant par une analyse avantage-coût raisonné que par une réponse émotive. Cela explique par exemple, la situation des « justes » pendants les guerres : pourquoi des individus intégrés ont décidé de se mettre en danger en hébergeant, en sauvant des juifs pendant la seconde guerre mondiale. Leur réponse était que cela s’était imposé à eux qu’ils n’ont pas réfléchi un seul instant, c’était une évidence. L’analyse rationnelle entre le gain éventuel et le risque encouru ne justifiait en rien leur action. L’émotion de la détresse humaine en face de soi impose l’éthique comme une démarche première, avant tout raisonnement. Ce développement est riche d’enseignement, cela revient à dire que si j’adhère à une règle ce n’est pas tant qu’elle est raisonnablement juste comme l’aurait pressenti les modernes mais par exemple que je suis soulagé de penser qu’elle est juste. C’est l’émotion qui me fait choisir. Cela nous permet de repenser le rapport à la règle. Mais au-delà du rapport à la règle, cela nous permet de repenser la formation à l’éthique. La démonstration rationnelle de l’éthique ne favorise pas son apprentissage. Il ne servirait pas tant de raisonner le contrevenant que de lui faire peur pour être efficace. La peur du gendarme prend tout son sens. Cela bien évidemment interroge sur la responsabilité de chacun, si l’éthique est biologique, c’est une dotation initiale qui ne dépend pas de chacun, où est donc la responsabilité individuelle ?

Un dernier point, l’attitude empathique nécessite, comme on l’a vu, un cerveau capable de décontextualiser une information, de percevoir un indice qui oriente vers quelque chose qu’on ne perçoit pas. Il n’est pas rare de voir un chat se placer devant le réfrigérateur en regardant la poigné fixement. Si l’on regarde le chat hors de la présence humaine, avec l’usage de caméras, il n’a plus cette attitude. Le chat a acquis la connaissance que, derrière la porte, il y des choses qui l’intéressent et auxquels les humains savent accéder. Il utilise son passé pour se représenter l’avenir. Cette vision n’est pas loin des classiques du behaviorisme, qui d’ailleurs utilisaient aussi le monde animal. Mais si l’on va plus loin et que l’on suit Boris Cyrulnik, le processus empathique est déclenché par le phénomène des « neuro-miroirs ». Giacomo Rizzolatti et Luciano Fadiga, de l’Université de Parme, en 1998, en observant les singes furent surpris quand ils réalisèrent que le singe qui regarde un autre réaliser une action active exactement la même zone de neurones. La résonance commence dès le début de l’interaction comme si le fait de voir m’intéresse tellement que mon cerveau se prépare à effectuer la même action. Avant d’être comportementale, l’imitation est neurobiologique. Grâce aux neurones miroirs les singes permettent de partager un monde de singes. Ainsi les émotions deviennent contagieuses grâce aux neurones miroirs. Nos neurones miroirs entrent en résonnance avec le geste de l’autre qui nous touche. Cela donne une autre perspective aux travaux de Georges Thinès, qui montrent à partir d’études biologiques qu’un individu ne peut survivre qu’en échangeant des informations avec le monde qui l’entoure. C’est l’autre qui me permet de vivre, grâce à la formation que me procure sa présence.

Encore faut-il être capable de décoder les signes de l’autre. Les enfants mal traité ont par exemple beaucoup plus de difficultés à comprendre leur environnement. Ils sont tellement vigilants que le plus petit signe sera perçu comme une violence. Il faut être en paix soi-même pour mieux décoder les signaux de l’autre. L’acte de transmettre se présente sous un nouvel angle. Un bon formateur serait un individu empathique, capable grâce à ces neuro miroirs de partager le monde des stagiaires. Et inversement son travail serait de construire un univers formatif capable de créer un climat de confiance pour les stagiaires et des les aider à comprendre les signaux des autres. Le groupe en confiance permet d’apprendre ensemble en permettant à chacun d’exister par elle-même et surtout de trouver une résonnance sur et par le groupe. L’acte de formation peut être alors éthique.

Marc Hauser propose d’aller encore plus loin en pensant la morale comme une langue. Les gens tireraient des conclusions morales comme des phrases sans avoir été formé à la linguistique. Il prend un exemple d’un médecin qui enlève le tube d’alimentation d’un patient en phase terminal et d’un autre qui administre une drogue pour euthanasier le patient. Pour Marc Hauser, la seule différence et que dans le second cas une émotion plus forte est présente mais en fin de compte le docteur intervient dans les deux cas pour réduire la souffrance ou encore que dans les deux cas le patient est mort. L’éthique peut être partout même sans s’en rendre compte. Comme monsieur Jourdain, nous ferions de l’éthique sans le savoir, on est loin de l’approche moderne d’une éthique raisonnée et consciente. Comme les impressionnistes chaque couleur n’a de valeur qu’à côté des autres pour qu’ensemble le tableau révèle sa nature.

Monday, July 24, 2006

Pédagogie II
Le behavorisme

Le courant behavioriste est né officiellement en 1913 avec l'article de John Broadus Watson (1878-1958) "Psychology as the behaviorist views it" et s'est imposé aux Etats-Unis durant plus de la moitié du XXème siècle (jusque dans les années 60). Ce courant privilégie le comportement ("behavior", comportement) par opposition aux "mentalistes" qui ouvriront la voie au courant cognitiviste, comme nous le verrons dans un article ultérieur. Il a servi de base à la professionnalisation des métiers de la formation autour d'une démarche scientifique, comme l'illustre le titre du livre de Burrhus Frederic Skinner, "la révolution scientifique de l'enseignement" (1968). Il s'appuie sur l'expérimentation des comportements observables, mesurables... dans la parfaite logique du paradigme dominant, rappelons que "the principles of scientific management" de Frederic Winslow Taylor fut écrit en 1911.

La démarche behavioriste est intéressante car elle permet de sortir des incantations en matière de formation, de savoirs ou de compétences pour proposer des modes opératoires de la transmission comme l'explique clairement Burrhus Frederic Skinner (1968) : "Dans les efforts pour améliorer l'enseignement, il est extraordinaire de constater à quel point le problème de méthode est négligé. Nul ne prend la peine d'analyser l'enseignement et l'apprentissage, et l'on ne fait en réalité aucun effort pour les améliorer en eux-mêmes... On entend partout : "il faudrait construire des écoles plus nombreuses et meilleures, il faudrait recruter des maîtres plus nombreux et meilleurs, il faudrait rechercher des meilleurs élèves, il faudrait multiplier les contacts professeurs-élèves, il faudrait élaborer de nouveaux programmes." On ne se demande pas comment ces meilleurs professeurs, travaillant dans de meilleures écoles avec des élèves meilleurs, s'y prendront pour enseigner. Et comme le meilleur professeur parlant de la meilleure école à ses meilleurs élèves s'aperçoit qu'il y a une formidable déperdition d'énergie et que seulement un pourcentage infime de ce qu'il dit "passe" (en attendant d'être rapidement oublié) il est alors découragé". Burrhus Federic Skinner propose un process sur le comment bien former avec l'équivalent d'une organisation scientifique de la formation. C'est la première réflexion dans ce sens, ce qui donne une valeur particulière au courant behavioriste.

Le paradigme behavioriste repose sur 3 hypothèses de base :
Postulat 1 : On ne peut pas accéder aux états mentaux de façon empirique (nous sommes dans les années 50-60) alors les behavoristes choisissent l'analyse des comportements observables afin de rester dans une démarche scientifique. C'est le concept de la "boîte noire". L'observateur ne s'intéresse qu'aux imputs et aux outputs. C'est un peu comme un conducteur automobile qui ne connaîtrait rien à la mécanique, il sait qu'il faut mettre de l'essence pour faire avancer le véhicule : ce qui l'intéresse c'est de se déplacer avec ce véhicule, pas besoin de connaître l'outil pour pouvoir l'utiliser. Dans notre cas, pas besoin de comprendre l'individu pour le former.
Postulat 2 : On peut contrôler et donc prédire les connexions entre les stimulations externes ou internes (les stimuli) et les réponses. "Donnez-moi une douzaine d'enfants bien portants, bien conformés, et mon propre milieu spécifique pour les élever, et je garantis de prendre chacun au hasard et d'en faire n'importe quel type de spécialiste existant : docteur, juriste, artiste, commerçant et même mendiant et voleur, sans tenir compte de ses talents, penchants, tendances, capacités, de sa vocation ni de la race de ses ancêtres" John Broadus Watson, l'ambition de l'aventure behavioriste était grande.
Postulat 3 : On peut décomposer les comportements en unités. Nous sommes là dans la démarche taylorienne où non seulement on peut décomposer un process en tâches élémentaires mais encore des "spécialistes" peuvent et doivent construire une structuration optimale. On introduit la fonction d'ingéniérie pédagogique (on peut se rappeler que le mot ingénieur vient du vieux français engigneor et qui signifie constructeur d'engins de guerre, la formation pour faire la guerre?). Cette ingénierie repose sur la modélisation et tout particulièrement la modélisation mathématique.

Le behaviorisme repose sur 4 types d'outils :
1. L'associationnisme
2. L'apprentissage par essais erreurs
3. Le conditionnement classique
4. Le conditionnement opérant

1. L'associationnisme

L'associationnisme est le précurseur du behaviorisme. Cette théorie consiste à associer les situations anciennes à des événements nouveaux. Ainsi, par exemple, un adulte à qui on propose une formation, va associer son comportement à des situations anciennes comme par exemple son aversion ou son plaisir qu'il a déjà rencontré sur les bancs de l'école. En fonction de son histoire, il aura une réaction plus ou moins positive.
L'auteur central de ce courant est David Hartley (1705-1757), médecin anglais, dans son livre "Observations sur l'homme, son organisation, ses devoirs et ses espérances" (1749). Son livre ne semble pas avoir séduit ses contemporains. C'est à Stuart Mill que revient la responsabilité, un siècle plus tard, de faire connaître cette thèse. Il ne tarit pas d'éloge : "ce que la loi de la gravitation est à l'astronomie, ce que les propriétés élémentaires des tissus sont à la physiologie, les lois de l'association des idées le sont à la psychologie."
Pour les tenants de ce courant, les phénomènes psychologiques reposent sur deux lois :
1. la psychologie se ramène aux "sensations" (raisonnement, logique, sentiment ou volonté) qui s'associent par continuité uniquement. On parle du principe de continuité.
2. le plaisir et le déplaisir sont la base des sentiments et de la motivation.
Les stimulations et les réactions répétées augmentent le lien de l'association. La connaissance, le raisonnement trouve son origine dans l'association avec les "invariants" soit de l'individu, selon Stuart Mill, soit de l'espèce, selon Herbert Spencer. Outre l'idée de l'invariant, l'associationnisme introduit la réaction aux stimulis qui servira de "noyau", au sens d'Irme Lakatos, au behaviorisme.

2. L'apprentissage par essais erreurs

Edward Lee THORNDIKE (1874-1949) est le premier à véritablement s'intéresser à la pédagogie. Il introduit le concept de tatonnement, sélectionner parmi les réactions spontannées. Comme a l'accoutumé l'expérimentation se fait sur des animaux. Il met en évidence "l'apprentissage instrumental". On enferme un chat affamé dans une cage comportant une porte munie d'un loquet. Un peu de nourriture est placée à l'extérieur. Si l'animal manoeuvre efficacement le loquet, la porte s'ouvre et il peut atteindre la nourriture. Placé dans cette situation, l'animal manifeste des comportements divers dits exploratoire puis, par hasard, il manoeuvre le loquet ce qui lui donne accès à la nourriture. Lorsqu'on recommence l'expérience, on s'aperçoit que le temps mis par l'animal pour sortir de la cage décroît progressivement ; au bout d'un certain nombre d'essais, l'animal parvient à ouvrir le loquet dès qu'il est placé dans la cage. L'apprentissage est alors considéré comme réaliste. Selon Edward Thorndike, dans un apprentissage instrumental, une association entre une situation-stimulus, par exemple l'intérieur de la cage, et une réponse particulière est renforcée parce que cette réponse est suivie d'un état satisfaisant (le bien être que procure la nourriture à un animal affamé). Ce concept d'association stimulus-réponse marquera profondément la psychologie de l'apprentissage. Toutefois, comme la satisfaction est une donnée subjective très difficile à analyser, les successeurs tentent d'objectiver davantage la cause du renforcement de l'association entre stimuli réponses.
Edward Thorndike introduit une série de lois que l'on synthétise par le "drill and practice" :
1. La loi de l'effet : plus grande est la satisfaction ou le désafection, plus grande sera la force ou la faiblesse du lien. La loi de l'effet fournit une description des apprentissages associatifs : "une action qui produit un résultat désirable sera probablement répétée dans des circonstances similaires" Edward Lee Thorndike (1898). Le stimulus avec un renforcement positif augmente la performance alors qu'avec un renforcement négatif cela réduit la performance ; le drill répétitif n'implique pas automatiquement l'apprentissage.
2. La loi de l'exercice : La probabilité d'émission d'une action augmente avec le nombre d'essais effectués. Cette loi est renforcée par la notion de feed back. Marcel Crahay propose une typologie des feed back avec le feed back simple, expliqué ou contrôlé qui renforce plus ou moins l'efficacité de l'apprentissage.
Le "drill and practice" est parfois appelé le "modèle du répétiteur". Il est utile pour faire apprendre "par coeur" un savoir (par coeur doit être entendu dans son sens historique, avec courage). Il n'est pas forcément nécessaire d'expliquer, c'est la pratique qui compte. L'intervention du formateur est faible, c'est surtout le travail de l'ingénieur pédagogique qui développe un programme de stimulation et de validation autour d'un feed back pour connaître l'efficacité du système. Margaret D. Roblyer (2005) considère cette technique classique est particulièrement bien adaptée dans des domaines qui sollicitent essentiellement la mémoire brute. Elle retrouve même une seconde jeunesse avec les formations assistées par ordinateur.

3. Le conditionnement classique ou conditionnement répondant

Le père du conditionnement classique est le médecin russe Ivan Pavlov (1849-1936). Au cours des travaux sur la physiologie digestive, Ivan Pavlov remarque que la salive et les sécrétions gatriques, qui sont normalement déclenchées chez un chien par la présence de nourriture dans la gueule, peuvent aussi être induites par les stimuli précédant son ingestion. Par exemple, la vue du bol ou de l'employé d'animalerie peut déclencher cette salivation, la réponse attendue. Les stimuli a priori inefficaces pour déclencher un réflexe biologiquement important, la salivation, peuvent déclencher une réponse semblable s'ils sont associés avec le déclencheur naturel du réflexe, dans notre cas la nourriture. Tout se passe comme si l'animal réagissait à ces stimuli comme à la nourriture même. Ce type d'apprentissage est fondé sur l'association entre le stimulus dit conditionnel (qui n'as pas, au départ, de signification pour l'individu) et un stimulus inconditionnel (nourriture) qui devient capable de déclencher seul la réponse (salivation) normalement déclenchée par le second stimulus. Dans son expérience, un chien salive lorsqu'il aperçoit de la nourriture (stimulus inconditionnel). Si on associe un stimulus conditionnel (qui n'a aucune signigication pour l'animal : par exemple, un signal sonore) à la représentation de la nourriture (stimulus inconditionnel), l'individu va associer la perception du signal conditionnel au stimulus inconditionnel. On pourra, dans une seconde étape, supprimer le stimulus inconditionnel (la nourriture) et la perception du seul stimulus conditionnel (signal sonore) fera saliver le chien (réponse motrice). Le conditionnement classique est une forme d'apprentissage qui associe un stimulus et une réponse. Au départ, le stimulus ne suscite aucune réaction puis il acquière cette capacité comme un reflex conditionné. Pour se faire l'ingénieur pédagogique devra segmenter la connaissance finale en étape élémentaire pour produire un processus pédagogique "étape par étape" ; par exemple, pour savoir le code de la route, on peut commencer par connaître les panneaux les plus fréquents, les répéter pour développer des automatismes qui libèreront l'attention lors de la conduite. Chaque étape amènera des répétitions réactions qui développeront l'autonomie qui renforceront les mécanismes d'apprentissage.
Délaissé dans les années 70, ce courant a retrouvé une nouvelle jeunesse dans les années 80 avec le travail d'Arthur Staats (1924- ). Il introduit le "behaviorisme social" ou "behaviorisme paradigmatique" où il enrichit la notion de stimuli qu'il définit comme conditionné répondant, renforçants et directifs. L'originalité est double, elle porte tout à la fois sur le fait que les stimuli du conditionnement inconditionnel sont enrichis avec des stimuli émotionnels, verbaux, non verbaux,... et sur le fait social avec des attitudes, du leadership, du mimétisme, de la persuasion,... Aimée Leduc a proposé une série d'étude particulièrement intéressante autour des enfants ayant souffert d'isolement social.

4. Le conditionnement opérant

Contemporain de Ivan Pavlov, Edward Lee Thorndike met en évidence une autre forme d'apprentissage associatif : l'apprentissage instrumental. Dans la tradition pavlovienne, il expérimente sa théorie sur les animaux. Il place un animal affamé, un chat, dans une cage équipée d'un mécanisme qui permet à l'animal d'ouvrir la porte et d'atteindre la nourriture qui se trouve à l'extérieur. La première fois, l'animal émet généralement des comportements inappropriés : il se frotte sur les parois, miaule, mord et griffe, avant de finalement actionner le mécanisme d'ouverture. L'apprentissage, mesuré par le temps nécessaire pour sortir de la cage, est très lent au début mais s'améliore graduellement avec les essais. Le chat élimine progressivement les réponses inappropriées et acquiert ainsi par essais et erreurs un comportement efficace. Selon Edward Lee Thorndike, dans un apprentissage instrumental, une association entre une situation stimulus, par exemple l'intérieur de la cage, et une réponse particulière est renforcée parce que cette réponse est suivi d'un état satisfaisant, le bien être que proccure la nourriture d'un animal affamé. Ce concept d'association stimulus réponse marquera profondément la psychologie de l'apprentissage. Toutefois, comme la satisfaction est une donnée subjective très difficile à analyser, les successeur de Thorndike tentent d'objectiver davantage la cause du renforcement de l'association entre stimuli réponses. Burrhus F. Skinner (1904-1990) a étudié l'apprentissage instrumental qu'il a rebaptisé du nom de "conditionnement opérant". L'apprentissage peut être obtenu par l'utilisation de récompenses appelés "renforcements positifs" (la nourriture chez les rats de laboratoire) et de punition appelés "renforcements négatifs" (un choc électrique). L'individu adopte un comportement lui permettant d'éviter les renforcements négatifs et d'augmenter la probalité de renforcements positifs. Cette procédure s'appelle "conditonnement opérant" : c'est le comportement qui opère sur l'environnement. L'étude du conditionnement opérant porte sur l'analyse de l'association (le lien) que réalise l'individu entre son comportement et l'événement qui le suit. Si le comportement est renforcé positivement (récompense), il y a alors plus de chance de se produire à nouveau. Si à l'inverse, le comportement est renforcé négativement (choc physique ou émotionnel), il a moins de chance d'apparaître dans l'avenir. Burrhus Skinner estime qu'il n'est pas utile ni nécessaire de faire appel à des processus internes comme la satisfaction, la motivation, la mémoire ou la cognition. Il suffit, selon lui, de décrire ce qui est directement observable. Ce qui se passe entre le stimulus et la réaction, dans la boîte noire n'était pas accessible à l'analyse scientifique. Le renforcement est ainsi caractérisé par tout stimulus ou événement qui augmente la probabilité ultérieure de l'apparition d'un comportement.

Burrhus Skinner (1968) radicalise le courant, on parle même de "neo behaviorisme". Dans la révolution scientifique de l'enseignement, il détaille la théorie du conditionnement opérant autour de 4 principes :
1. L'apprentissage consiste à mettre en place un comportement nouveau en réponse à un stimulus. Ce comportement observable doit être précisemment décrit ent liste d'actes le composant. "La première démarche de toute pédagogie est de définir le comportement qu'il s'agit, en fin de compte, d'installer"
2. Multiplier les occasion de distribuer des renforcements positifs. Seuls ces renforcements permettrent la mise en place d'un réponse adéquate. Pour Skinner l'école ne fournit que trop peu de renforcements et le plus souvent ceux-ci sont négatifs. Le stimulus, dans le conditionnement opérant, ne déclenche pas le comportement attendu mais permet de le selectionner en éliminant progressivement les réponses inappropriées. Dans ce cadre Skinner, seules les conséquences positives d'une action permettent la consolidation d'une réponse. "Nous apprenons quelque chose de nos erreurs mais un comportement correct n'est pas tout simplement ce qui reste lorsque les comportements erronés ont été éliminés". Dans ce cas, l'erreur est une perte de temps. L'éducation sert à créer des comportements et pas à éliminer des conduites insatisfaisantes. "Nous ne renforçons pas, précise-t-il, la bonne prononciation en punissant la mauvaise, ni des mouvements habiles en punissant la maladresse". Contrairement à Edward Lee Thorndike, il affirme l'erreur nocive pédagogiquement et donc le tatonnement équivaut à "jeter les gens à l'eau pour leur apprendre à nager, voilà à quoi se ramène cet entraînement... Quelques-uns d'entre eux réussiront à en sortir... Nous pouvons prétendre leur avoir appris à nager, bien que la plupart nagent fort mal... quant aux autres, ils couleront."
3. La décomposition du contenu d'apprentissage en maximun d'unité de formation. Cette segmentation assurant l'organisation séquentielle de l'apprentissage (progression du plus simple vers le plus compliqué) qui multiplie les opportunités de contrôle du comportement et la possibilité d'effectuer des renforcements. "En faisant chaque fragment aussi petit que possible, on accroît au maximum la fréquence du renforcement, tout en réduisant au minimum l'éventuel caractère aversif des erreurs"
4. Le programme de renforcement doit pouvoir prendre en compte des différences interindividuelles principalement quant à la célérité d'apprentissage : "Nous n'apprenons pas à l'élève à étudier vite en punissant sa lenteur, ni à retenir en punissant ses oublis, ni à raisonner juste en punissant ses illogismes". Burrhus Skinner a utilisé des machines à enseigner plus des ordinateurs pour l'apprentissage humain. A chaque fois que la personne émet un bonne réponse, la machine lui fournit un renforcement positif (message tel que "exact, très bien, continuez,..."). L'élève ne peut aborder une étape du programme d'apprentissage que si la précédente est parfaitement maîtrisée. Il y a 3 conditions d'apprentissage optimal pour Burrhus Skinner, conditions qui sont réunis dans l'apprentissage programmé : focalisation de l'attention de l'apprenant sur un segment de matière très ciblé ; obligation de fournir une réponse pour chaque segment, connaissance immédiate de la validité de la réponse. L'apprentissage programmé permet de décharger l'enseignant de la technique même et lui donne donc du temps pour s'intéresser à ses stagiaires et les conseiller. "Il est essentiel de comprendre que l'élève n'absorbe pas passivement le savoir mais doit jouer un rôle actif et que ce rôle actif ne se résume pas à parler. Savoir, c'est agir avec efficacité, à la fois sur le plan verbal et sur le plan non verbal".
D'autres auteurs enrichisse le néo behaviorisme. Clark Leonard Hull (1884-1952) propose une méthode hypothético-déductive systématique. Le comportement est une interaction entre l'individu et l'environement, il trouve deux racines : la pulsion, source de motivation et l'habitude, répétition d'un comportement préalablement renforcé. Edwin Ray Guthrie (1886-1959) introduit l'existence de plusieurs stimuli pas toujours identifiables mais l'apprentissage peut influencer la réponse. Edward Chace Tolman (1886-1959), pour lui le comportement n'est pas seulement "réactionnel"; il agit en fonction d'une visée qui lui est propre. Le "but poursuivi", le "dessein" définisse le "purposive behavior".

Le behaviorisme est un paradigme qui s'inscrit dans une démarche dynamique. Il existe de nombreux développements. Traditionnellement, on regroupe ces développements autour de deux courants majeur : le courant socio cognitif et le le courant socio constructiviste.

1. Le courant sociale cognitif
"Ce courant de la psychologie fait appel à des schémas acquis antérieurs pour expliquer les comportements actuels des personnes. Ces schémas sont principalement des croyances qui servent à organiser les expériences dans les situations actuelles." David Meichenbaum (1977). Comme son nom l'indique il introduit le cognitif (les "mentalistes") dans la démarche behavioriste. Julian Rotter (1916- ), qui a été fortement influencé par la grande dépression, pour se rendre compte de l'injustice sociale et de l'effet de l'environnement situationnel sur les personnes. En développant la théorie de l'étude sociale, Julian Rotter reprend la "loi de l'effet" en y ajoutant une étude de la personnalité comme force motrice avec des motivations internes ("qui vient de moi"), source d'estime de soi et des motivations externes ("ce qui vient des autres"), source de compétences reçues, valorisation. On le considère parfois comme le père de ce courant ; d'autres lui préfère Aaron T. Beck (1921 - ) et sa Thérapie cognitive et comportementale (TCC), il reprend le conditionnement classique et opérant du behaviorisme et y ajoute l'apprentissage social comme le mimétisme ("je travaille comme mon père") et enfin le cognitif avec face à un stimulus une perception, une interprétation qui vont influencer le comportement. Cette dernière dimension ouvre la porte à un travail sur le fait de transmette en travaillant sur les pensées pour mieux se comprendre et développer un "auto-contrôle". Mais le plus prolifique de ce courant est Albert Bandura (1925 - ). Il propose, comme traditionnellement, que l'environnement détermine le comportement mais aussi que le comportement influence l'environnement. La rétrodétermination a été ensuite enrichi dans le tryptique environnement, comportement et les processus cognitif de la personne. La complexification avec le cognitif introduit la notion de stratégie d'apprentissage de l'individu, auto régulation, tant au niveau de la perception, le jugement ou la réponse. Selon l'auteur il permet de réaliser la "révolution cognitive" du behaviorisme. Sa capacité à la modélisation et sa méthodologie autour de la quantification s'inscrivent parfaitement dans la démarche de la psychologie scientifique.

2. Le courant socioconstructiviste
La construction d'un savoir s'effectue dans un cadre social. Le père fondateur est Lev Semionovitch Vygotski (1896-1934) qui a plus ouvert la porte qu'il n'a fondementalement construit ce courant mais aujourd'hui de nombreux auteurs comme Willem Doise (1935- ) ou Howard Earl Gardner (1943- ) ou encore Anne Nelly Perret Clermont. Willem Doise a étudié le rôle des interactions sociales entre pairs dans le développement de la connaissance selon une perspective structuraliste piagétienne. Un rôle important est reconnu au conflit cognitif. Ils parlent en terme de conflit socio-cognitif et démontrent que les confrontations entre individus sont à la source du développement. Il propose un modèle en spirale avec succession alternée de phases : confrontation interindividuelle et construction de schèmes cognitifs ; nouvelles compétences acquises et activité autonome du sujet permettant de nouvelles constructions. D'après cet auteur, il est important de se préoccupper du lien eventuel entre le social et le cognitif, d'une origine sociale de l'intelligence (environnement social). Le contexte social réfère aux personnes, aux règles des groupes sociaux dans lesquels on est intégré, et également aux normes sociales. Howard Earl Gardner proposait d'ouvrir l'apprentissage à de nouveaux champs : logico-mathématique, spirale, interpersonnel, corporel-kinesthésique, verbo-linguistique, intrapersonnel, musical-rythmique et naturaliste. Ce qui ouvre la pédagogie à des canaux nouveaux.

Les critiques principales du behaviorisme sont très tôt apparues. On peut les synthétiser en reprenant l'ouvrage de Marc Richelle (1930- ) "Skinner ou le péril behavioriste" (1977) :
1. Le behaviorisme ne prend pas en compte la partie cognitive de l'apprentissage avec le travail sur la perception, la mémoire, le langage et l'émotion dans ce qu'elle a d'individuel. En effet, il existe d'autres modes d'apprentissages que celui de l'association. Même si certains auteurs ont tenté de dépasser le cadre behavioriste en introduisant des concepts mentalistes comme nous l'avons vu avec le courant social cognitiviste, d'autres au sein du néo-behaviorisme ont tenté d'enrichir le modèle. Ainsi Clark Hull (1884-1952) considère qu'entre le stimulus et la réponse, la théorie pouvait prendre en compte des "variables intermédiaires" en nombre limité telles que la "force de l'habitude" ou le "niveau de besoin" que l'on peut inférer à partir des observations stimuli-réponses. Clark Hull a formalisé sa théorie en 1943, "Principles of behavior". Un stimulus opérant doit tenir compte de la différence entre la motivation et la fatigue pour observer les résultats dans leur vitesse et leur amplitude. Mais sans définir particulièrement le concept de motivation et de fatigue. Ou encore Edward C. Tolman (1887-1955) qui proposait une "théorie intentionnelle" faisant appelle à de nombreux concepts cognitifs comme la connaissance, la pensée, la planification, l'indiférence,... La connaissance de l'environnement est organisée en cartes cognitives. L'apprentissage restant fonction de la motivation (la faim) et la récompense. Un rat explore librement un labyrinthe pour se nourrir, il mémorise une carte du labyrinthe qui lui permettra de changer lorsque le chemin le plus court n'est plus ouvert. La motivation pour la formation se trouve nourrit par deux sources la motivation externe, comme une récompense financière et la motivation interne (MI) comme la curiosité. Selon Edward L. Deci (1971) si on renforce par la ME, on tue alors la MI. Or selon Harry L. Harlow (1906-1981) le désir d'apprendre provient de la MI... la fameuse "apétence".
Pour être plus complet le rejet des "mentalistes" a été justifié par le fait que l'observation n'était pas possible et que pour préserver une méthodologie scientifique vérifiable, il fallait abandonner le "mental" au profit de la fiction de la "boîte noire". L’imagerie par Résonance Magnétique (IRM) permet depuis une vingtaine d’année de produire des images de l’anatomie ‘statique’ du cerveau, avec une précision millimétrique. Plus récemment, l’IRM est aussi devenue ‘fonctionnelle’ (IRMf), montrant l’activité des différentes structures qui composent notre cerveau. L’imagerie neurofonctionnelle par IRMf repose sur deux concepts fondamentaux. Bien que l’imagerie neurofonctionnelle, aujourd’hui, ne permette pas de descendre à l’échelle des neurones, les travaux en cours laissent présager qu’un jour nous pourrions peut-être même avoir accès en partie à la nature de l’information traitée par les différentes régions de notre cerveau, et donc, d’une certaine manière, à une petite fraction du contenu de nos pensées... Aujourd'hui, le processus de transmission des informations aux zones concernées pour générer le comportement est observable, donc mesurable selon le critère de John B. Watson. Le modèle behavioriste peut donc ouvrir la "boîte noire" sans sortir de son paradigme et le temps devrait accroître la précision et le bien fondé de la démarche.
2. Le behaviorisme impose une hiérarchisation entre celui qui sait le formateur et celui qui apprend le stagiaire. Aujourd'hui, la relation top-down pour des raisons sociologiques est remis en cause et de nouveaux modes d'apprentissages voient le jour et le formateur expert s'enrichi d'une nouvelle dimension le formateur coach dans une démarche bottom-up. L'approche sur le fonctionnement du groupe est intéressante ainsi pour rester sur ses fondateurs Jacob Levy Moreno (1892-1974) considère, autour d'expérience sur le théatre spontané, que chacun est prisonnier des rôles qu'il se croit obligé de jouer dans un groupe. Cette pédagogie ouvre au traditionnel jeux de rôle. Là où Kurt Lewin (1890-1947) propose une démarche plus large pour comprendre la dynamique de groupe comme accélérateur de performance pédagogique. Même dans ce cas, il s'agit comme avec les behavioristes de créer un environnement favorable à la transmission collective de l'apprentissage.
3. Le behaviorisme deshumanise l'apprentissage en raisonnant sur la fiction du stagiaire. Burrhus Skinner parle même de "machine à enseigner" qui consiste à bien contrôler un environnement d'enseignement pour qu'il y ait apprentissage. "La machine en elle-même, naturellement, n'enseigne pas. Elle n'est qu'un instrument mettant l'étudiant en contact avec le spécialiste qui a composé le matériel qu'elle présente... Il n'est pas excessif de comparer la machine à un bon précepteur privé". Ce processus de transmission est assez logique dans un environnement taylorien avec pléthore de main d'oeuvre, comme l'a montré Benjamin Coriat, mais dans un environnement de pénurie la standardisation des stagiaires n'est plus la meilleure réponse formative. Avec les mêmes fondamentaux, la personnalisation peut devenir la référence sans pour cela sortir du cadre scientifique de la pédagogie. Tout est une question de méthode.

Le behaviorisme est-il dépassé ?
Si on revient à la définition même de la démarche scientifique, le behaviorisme est fait pour être dépassé, autrement dit pour être développé, en ce sens assurémment la réponse est oui. Mais l'on entend par "dépassé" obsolète, ou non valide, cela renvoie à la définition que l'on a des modèles théoriques, comme nous le verrons dans un article ultérieur. Pour l'instant nous pouvons considérer que dans le paradigme dominant le behaviorisme n'est plus le cadre de référence. Il reste toutefois des domaines où le behaviorisme classique apporte des réponses reconnues :
1. les problématiques soulevées par le behaviorisme sont toujours d'actualité avec par exemple la place de l'erreur dans l'apprentissage, ou le fractionnement de l'objet à former en étape élémentaire ou encore la place du feedback dans le processus d'apprentissage. On apprend parfois que savoir poser les bonnes questions est l'essentiel dans la résolution d'une problématique...
2. la professionnalisation du métier de formateur John B. Carroll (1916-2003) propose une fiche métier avec behaviorisme oblige des variables de contrôle. Le formateur doit communiquer clairement les consignes, présenter les tâches adequate à faire, organiser séquentiellement les tâches, grouper les stagiaires, réguler les interractions et/ou retroactions des apprenants. Cette professionnalisation ouvre voit aux problématiques des validations des acquis transmis pour évaluer la performance de la formation. Ce qui est toujours d'actualité c'est les outils de la professionnalisation des métiers de la formation.
3. La "pédagogie de maîtrise" formulée par Benjamin S. Bloom (1913-1999), à partir des idées de John B. Carroll, propose un modèle néo-behaviouriste pour l’apprentissage en classe. Il permettrait à la plupart des élèves d’atteindre un niveau de rendement que moins de la moitié atteindrait dans des conditions traditionelles d’enseignement. En même temps la difference entre les meilleurs et les plus faibles élèves serait fortement réduite. L’approche de Benjamin Bloom contient beaucoup d’éléments neo-behaviouristes : la structuration de l’enseignement, la formulation d’objectifs, le rôle important que jouent feeedback, indices, l’activité de l’étudiant et l’idée que chaque élève peut apprendre quasi toute tâche si l’enseignement lui est adapté.

Autrement dit, le behaviorisme a toujours une actualité même s'il n'est pas d'actualité. Il est intéressant de garder à l'esprit l'épistémologie même du concept de modèle, il porte dans son essence les limites qu'on lui reproche. Ne demandons pas à un modèle plus qu'il n'a à offrir.

Tuesday, March 14, 2006

Le CV anonyme est arrivé...
le jeudi 09 mars 2006

"dans les entreprises de 50 salariés et plus, les informations communiquées par écrit par le candidat à l'emploi doivent être examinées dans des conditions préservant son anonymat". Les modalités d'application feront l'objet d'un ou de plusieurs décrets suite à une concertation avec les partenaires sociaux. Pour être complet, cette loi fait suite à un rapport de Claude Bébéar "les entreprises aux couleurs de la France" en 2004.

Reprenons quelques chiffres repères :
1. Les jeunes des banlieues dites sensibles sont 3 à 5 fois plus touchés par le chômage que les autres. Selon le Rapport du Haut Conseil à l'Intégration (janvier 2003), dans les zones urbaines sensibles (ZUS) le taux de chômage des jeunes est de 38 % contre 23 % en moyenne pour l'ensemble de la France. La discrimination est une réalité sociale.
2. Dans le rapport du Conseil économique dirigé par Mouna Vipprey sur "L'insertion des jeunes d'origine étrangères" (26 septembre 2002), le diplôme reste la meilleur protection contre le chômage... même s'il persiste des discriminations. Pour un titulaire d'un second ou d'un troisième cycle ou d'une grande école, le taux de chômage varie suivant les origines : pour un Français de naissance, il est de 5 %, pour un étranger de l'Union Européenne, il est de 7,2 %, pour un Français par acquisition, il est de 11 % et, pour un étranger hors Union Européenne, il est de 18 %... A même niveau de compétences l'étranger hors Union Européenne est de 3 à 4 fois plus au chômage.

D'où vient le problème ? L'ascensseur social est en panne pour reprendre le titre du livre d'Aziz Senni (2005).

1. La mobilité sociale n'est plus ce qu'elle était...
Si l'on reprend l'article d'Alternatives économiques de février 2006 sur "la mobilité sociale en panne", Louis Maurin compare les données de l'INSEE entre 1979 et 2000 sur les CSP. L'autorecrutement des ouvriers et même des employers s'est accru alors que leur part dans des catégories comme les cadres s'est réduit. L'ascenseur est bloqué et le corps social se défend en protégeant ses enfants. L'ouvrier recrute des ouvriers.
Mais l'ascenseur fonctionne dans les deux sens et si l'on regarde les cadres, leur autorecrutement a fortement baissé passant de 51 % à 41,5 %. La part du recrutement de cadres dans la catégorie ouvriers passe de 12,7 % en 1979 à 18,6 % en 2000. L'ascenseur fonctionne aussi à la baisse, il n'est donc pas bloqué. Il en va de même pour les professions intermédiaires. On peut parler de dégradation sociale. Enfin pour les artisans, on assiste à une baisse de l'autorecrutement dont de l'immobilisme pour une meilleure insertion dans toute l'économie ; et les agriculteurs ont un ascenseur social plutôt en hausse. Il faut donc se méfier des globalisations trop simples. L'ascenseur existe même si le modèle global des trentes glorieuse n'est plus d'actualité. La forte croissance durable qui aspire l'ensemble de la population vers le haut ne marche plus en l'abscence d'une croissance économique forte. Quand le gâteau est plus petit, le corps social se protège et privilégie ceux qui sont en place. Cela ne favorise pas l'insertion des nouveaux quelle que soit leur origine.

2. Les voies d'insertion sont discriminantes.
Si l'on prend deux voies traditionnelles, l'école et l'entreprise.
Pour l'école, dans son rapport Claude Bébéar cite l'Union Nationale des Syndicats Autonomes (UNSA) qui constatait que la population des enfants de cadres supérieurs et d'enseignants représentait environ 15 % de la population mais occupait 80 % des places des grandes écoles. Ceux qui savent comment marche la machine privilégient leurs enfants. La discrimination est forte.
Pour l'entreprise, Jean-François Amadieu, dans enquête testing sur CV (Université Paris 1, Observatoire des discriminations, avril-mai 2004) qu'un homme de nom et prénom français résidant àParis et d'apparence européenne recevait en moyenne 75 entretiens alors qu'un nom et prénom maghrében résidant à Paris pour les mêmes compétences recevait en moyenne 14 entretiens. Un rapport de 1 à 5... La discrimination pour les minorités visibles comme on dit existe dans les faits.

3. La pénurie de main d'oeuvre propose un regard croisé
Le choc démographique est une réalité économique, même si sa réalité politique et sociale n'est pas encore établie. Les faits sont têtus. La France va avoir besoin de bras et de cerveaux et elle va forcemment être moins discriminante car le problème n'est pas qualitatif mais quantitatif. Dit avec plus de provocation une minorité visible vaut mieux que personne et il est fort à parier que les valeurs autour des minorités visibles ou non vont évoluer avec la prise de conscience des besoins des entreprises.
Cette évolution n'est pas pour des lendemains qui chantent puisque Michel Godet nous l'a prédit pour 2006. Il faut nuancer : pas tant sur 2006 qui peut être 2007 voir pour certains 2008, mais sur la notion de prise de conscience, cela peut prendre plus de temps pour certains types d'entreprise mais pour la majorité les besoins feront force de loi. D'ailleurs dès aujourd'hui nombre d'entreprises organise de la communication ethnique avec florilège de charte de la diversité, et ce n'est qu'un début...

Le cv anonyme s'inscrit dans l'ensemble du mouvement. Alors bien ou pas bien ?

Le cv anonyme touche l'ensemble des éléments discriminants : nom, prénom, adresse, sexe, âges, nationalité,... à compétences égales les minorités visibles devraient avoir le même nombre d'entretien. Mais la discrimination ne serait que repoussé. Et un refus à une lettre est-elle plus ou moins humiliante qu'un refus à un entretien ? Je ne sais pas. A moins que l'on poursuive la croisade en proposant les entretiens anonymes et pourquoi pas des employés anonymes ? On sent bien qu'il existe des réserves, je propose deux. La première est le fait de retirer à un individu une part de son identité. Si je suis maghrebin, je suis mes origines et pour être bien dans ma peau, dans mon poste je ne dois pas me travestir en autre chose que ce que je suis. L'intérêt de ces avatars réels serait de créer un monde de l'entreprise qui n'existe pas. D'où ma seconde remarque, créer des process qui ne soient pas humain n'a pas de sens. Un recrutement est une affaire d'hommes. Il y a l'affect. Poussons le raisonnement plus loin un maghrébin embauché dans une entreprise raciste, quel sens, quel avenir ? Il faut absolument qu'il rentre mais après ? ... Le travail doit se faire sur les mentalités. Je ne crois pas à cette déshumanisation des rapports de travail, c'est un reliquat de la modernité et du taylorisme qui n'est pas conforme à l'évolution entreprenariale.

Alors mauvaise chose ? Pas si sûr, nous sommes entrés dans l'ère des symboles et des signaux. Le signal fort envoyé en direction des entreprises est : changer vos comportements. Aujourd'hui, on assiste à une montée en puissance de la valeur de la diversité, il est bien que des responsables se mouillent pour être porte parole de ces valeurs. Les entreprises devront de plus en plus donner des gages d'entreprises non discriminantes pour avoir des valeurs en harmonie avec la société et si l'on rajoute la problèmatique démographique, les entreprises seront aux couleurs de la France, avec ou sans ce cv anonyme. Mais comme la rappelait Bernard Henri Levy sur une chaîne de télévision, aujourd'hui au Etats-Unis le futur débat pour les présidentiels est entre Hilary Clinton et Condoleezza Rice, deux femmes dont une black, on est loin des interrogations que l'on peut avoir en France avec Ségolène Royal. En terme de discrimination, il est souvent plus facile de pointer le voisin que de balayer devant sa porte. A méditer...

Monday, March 13, 2006

Ethique formative II
Autour d'Emmanuel Lévinas

Emmanuel Lévinas est un auteur incontournable qui porte un regard nouveau sur les questions d'éthique. Il pose "l'Ethique comme philosophie première" (1992), ce qui est un renouveau par rapport à l'histoire de la philosophie... depuis au moins Aristote. En effet, les historiens posaient l'ontologie comme fondement de la philosophie ou philosophie première pour rester dans le même vocabulaire. Il est décédé en 1995. Comment aborder une oeuvre aussi riche sans dénaturer le propos de l'auteur ?

Débutons avec lui par une observation : "c'est toujours le Même qui détermine l'Autre"(Totalité et infini, essai sur l'extériorité, 1971). Le Même sert à ranger les choses. Par exemple, le Rhône est un fleuve, "fleuve" est un concept qui permet de classer le Rhône comme la Seine. Mais un concept n'est pas une réalité. Personne ne s'est jamais baigné dans un "fleuve" mais dans une eau que j'appelle fleuve. La carte n'est pas le territoire... Ainsi, on parle volontier des concepts ou de leur articulation autour de théories mais dès que l'on veut l'incarner, c'est différent. Par exemple, pour rester dans l'actualité, on parle beaucoup de la défense des "jeunes" pour les aider à intégrer le monde du travail. Qu'est-ce qu'un "jeune" si ce n'est un concept plus ou moins incarné. Si l'on est pour, on peut dire que la jeunesse est l'avenir d'un pays... etc, etc... mais suis-je capable de partager avec X ou Y qui sont en bas de mon immeuble ? L'incarnation de ces "jeunes" n'est pas toujours aussi facile alors on reste sur le concept plus que sur l'incarnation. Le concept n'est pas la réalité, c'est une représentation de la réalité, comme l'a fort bien illustré Magritte avec son célèbre tableau la trahison des images. La connaissance consiste à saisir, à travers des concepts, l'individu non pas tant dans sa singularité que dans sa généralisation. Cette généralisation comme type de savoir est importante car elle conditionne le comportement de l'homme. La société crée une fiction, le "Moi" qui me représente. Ce Moi est ce que je dois être. Le devoir de l'individu de tout faire pour être ce qu'il doit être... quitte à oublier ce qu'il est dans la réalité. C'est l'archétype du "sois un homme mon fils". Et c'est souvent une prison que de chercher à être alors que l'on est autrement. Emmanuel Lévinas parle de "totalitarisme de la raison". L'individu se perd dans cette implication qui n'a pas de sens pour lui. Alors, comment faire ? L'individu doit "sortir de soi-même", lexicalement, sortir de soi comme un même, sortir de cette obligation à être, c'est ce qu'il appelle être "autrement qu'être" (livre phare d'Emmanuel Lévinas). Hors de cette sortie point de salut. La sortie n'est pas toujours facile. Dans un rapport de force à l'être, l'individu développe des stratégies de défense comme la paresse, la lassitude ou la fatique pour sortir de la contrainte par le bas. Emmanuel Lévinas encourage ces attitudes... la paresse comme acte révolutionnaire (même si cela ne fait pas partie de l'univers d'Emmanuel Lévinas), ou la lassitude comme démarche éthique cela surprend surtout dans un monde de la performance.
Et l'entreprise dans tout çà ? Pression à être performant, difficulté à être soi-même, recherche d'authenticité ("autrement qu'être"), démotivation,... voici une analyse qui d'emblée s'installe dans les problématiques des entreprises. Allons plus loin, l'entreprise est confrontée à une perte de sens. Un regard autour d'Emmanuel Lévinas nous propose la réponse suivante : l'entreprise se chosifie, elle se désincarne, elle perd sa dimension éthique. Comment travailler pour un concept ? Qui se motiverait pour un objet ? Pour un réfrigérateur par exemple (quoi que métaphoriquement parlant...) ? Cette chosification du travail n'est pas nouvelle puisque l'Organisation Scientifique du Travail fonde sa démarche sur l'abstraction du travail. Dans l'OST la démarche est moderne, l'homme autonome choisira le travail qui est rationnellement ou scientifiquement le meilleur. La nouveauté est de sortir de ce cadre partiellement éculé et de placer cette déscription en perspective de l'éthique comme nous allons le voir.
Et la formation dans tout çà ? Tout dépend de ce que l'on appelle formation. S'il s'agit de "mettre en forme", la forme préexiste à la formation. La formation est chosifiée. Elle consiste à définir un "être", un "soi-même" et de tout faire pour atteindre cet être. On retrouve le totalitarisme de la raison qui consiste à faire entrer de force l'individu dans le moule. Les responsables de formation ont tendance à dire qu'il n'y a aucun problème à former à quoique ce soit un individu motivé. Tout le problème est la motivation... On parle même d'appétence pour susciter cette envie à se former. Or le problème, ce n'est pas la motivation mais la formation elle-même. La formation n'est pas éthique...

Que peut-on y faire ?

"Au commencement était la relation", tout commence par là. Emmanuel Lévinas tape fort quand il annonce que si j'échange des contenus, j'occulte l'altérité. Par exemple, demander l'heure est un échange, une chosification du temps, on partage ainsi une connaissance signe de reconnaissance, mais où est l'Autre ? Pareillement, si la formation est une technique pour convaincre (dans convaincre, il y a vaincre, rapport de force), l'Autre n'est qu'un élément d'un projet éducatif. Il n'existe pas de part lui-même. On forme des stagiaires dans leur généralité mais non dans leur singularité. La formation consiste à faire entendre raison au stagiaire. La raison préexiste à l'échange, sans l'Autre. Il y a bien relation mais pas rencontre. L'Autre est un concept qui doit être capable de recevoir le contenu de ma formation. Or, la relation "je - tu" est le fondement de l'éthique. Si je suis intéressé, la relation n'accède pas à la rencontre et selon Emmanuel Lévinas, elle se prive de l'éthique. Pour aller plus loin, le langage est partie prenante dans soit la relation soit la rencontre. Il existe deux types de langage le "Dire" et le "Dit". Le Dit ferme la porte en proposant une connaissance mortifère, la connaissance universitaire par exemple avec un expert qui sait et qui dit. Et le Dire qui ouvre la porte à l'Autre, non pas énnoncer des savoirs mais parler à quelqu'un sans s'intéresser au contenu mais à l'individu. "Toute relation humaine en tant qu'humain procèdent du désintéressement" (Autrement qu'être). Ainsi on s'ouvre à l'Autre.

Emmanuel Lévinas introduit "l'épiphanie du visage". L'Autre à travers son visage s'exprime dans son authencité comme étranger. "L'accès au visage est d'emblée éthique". Je m'expose à lui dès que je lui parle. "Les choses n'ont pas de visage". L'Autre est mon prochain avec sa fragilité pas seulement mon semblable dans le sens même genre. Pour lutter contre la démotivation, il s'agit de ne pas rester les bras croisés devant la nudité du visage de l'autre ne pas s'emmurer dans le train train de l'être. C'est notre responsablité en tant qu'homme. L'éthique est la philosophie première... l'aventure de l'Autre.
Comment la formation peut relever le défi de l'éthique ?
Avant de proposer une ouverture plus riche, il est a noté que l'entretien professionnel répond parfaitement à ce désir de face à face. Tout dépend comment on veut le mettre en chantier "être" ou "autrement qu'être" ? Cela fera l'objet d'un autre cheminement.
Ma seconde remarque reprend l'idée que j'ai développée dans un texte précédent, "la pédagogie du projet", où Philippe Meirieu proposait une nouvelle pédagogie fondée sur ce que les stagiaires veulent faire, les écouter et leur apporter l'aide dont ils ont besoin. Il s'agit de renverser le sens de la formation : le formateur expert devient un formateur animateur, la transmission touche son publique. La connaissance s'incarne de par le fait que l'on part de cette incarnation. Ces expériences pédagogiques nouvelles semblent très riches d'enseignement. En donnant à chacun la possibilité de s'exprimer dans sa singularité cela revient à remettre l'homme au centre de l'entreprise. C'est ce que certains chosifient déjà avec le concept de "l'entreprise apprenante"... on n'échappe pas à ses démons.

Tuesday, January 24, 2006

Ethique formative I
Vagabondages

L'éthique peut-elle s'associer à la formation ? On en parle mais de quoi parle-t-on ? L'éthique, qu'est-ce que c'est ? Et la morale ? Pour André Comte Sponville l'éthique est une dimension individuelle alors que la morale est une dimension collective, pour Edgar Morin, c'est le contraire, alors qui suivre surtout lorsque l'on sait que l'éthique et la morale ont la même origine mais pas la même langue, grec pour l'éthique, latin pour la morale ? L'étymologie des mots est toutefois plus subtile éthos en grec signifie mode de vie, coutume, usage alors que mos en latin signifie aptitude à respecter les règles. La morale est un fait social qui consiste à énoncer des règles, des normes se référant à un système de valeurs. Cela permet de juger ce qui est bien ou mal. Chaque culture d'entreprise avec des valeurs implicites et/ou explicites construit sa morale qui permet d'évaluer l'ensemble des actions concrètes des collaborateurs. Alors que l'éthique est une démarche sur le pourquoi ces règles. Quel est leur sens ? C'est une réflexion sur les motifs comme l'intérêt, la performance, le plaisir,... Autrement dit l'éthique est le fondement de la moral. C'est tout naturellement avec la crise des valeurs que la morale n'est plus acceptée comme telle mais nécessite un détour pour justifier de son existence. L'entreprise qui est en quête de sens est une entreprise qui engage une démarche éthique alors qu'avec le taylorisme par exemple, les règles était posées et imposées, il ne restait plus qu'à les appliquer. L'entreprise était dans une problématique morale : comment faire appliquer l'organisation scientifique du travail (avec l'hypothèse implicite, ce qui est scientifique est bien) ? Le rôle de la formation est de transmettre des savoir-faires identifiés. Dans ce cas la problématique est morale. On raisonne sur le comment avec l'ingéniérie pédagogique et non pas sur le pourquoi. Or l'éthique de la formation raisonne sur le pourquoi et quel sens donner à la formation. On parle même de donner une dimension stratégique à la formation. Il s'agit bien de reconnaître que cette interrogation éthique procure un avantage concurrentiel.

L'éthique formative : on parle par exemple de la formation tout au long de la vie et tout le monde donne le sentiment que c'est normal. Mais un homme apprend déjà tout au long de sa vie, chaque instant est un lieu d'apprentissage, un coucher de soleil nous apprend beaucoup. Même les plus optus apprennent, les jeunes agissent différemment des personnes âgées, le temps nous apprend. Alors... si on décide d'en faire une loi (loi fillon) c'est bien que l'on décide un type de formation et il est intéressant de s'interroger sur les raisons qui conduisent à un tel choix. On évite ainsi d'accepter des évidences qui sont loin d'être évidentes quand on s'y penche. S'il s'agit de formation continue, finie la formation avec la retraite, ce qui n'est pas absurde puisque si l'on reprend la théorie du capital humain de Gary Becker, une formation est un investissement qui appelle un retour sur investissement (c'est pourquoi Gary Becker ne parlait que de formation initiale), pourquoi investir après la retraite ? La question n'est pas neutre. Mais cela conduit aussi à penser la formation initiale dans le processus. Et aujourd'hui, cela semble précurseur. Alors formation tout au long de la vie professionnelle ? Pas si simple, mais la question vaut d'être posée et c'est le lieu de l'éthique formative.

Sans déflorer tout le sujet, commençons notre débroussaillage avec quelques références. Le père de l'éthique moderne, Emmanuel Kant, donne un exemple tout à fait significatif sur la définition de l'éthique et comme elle s'applique au monde de l'entreprise, on peut parler d'éthique entreprenariale. "Il est sans doute conforme au devoir qu'un marchand ne surévalue pas sa marchandise auprès d'acheteurs inexpérimentés ; et, dans le commerce courant, le marchand prudent ne le fait jamais, mais il a un prix fixe pour tout le monde, en sorte qu'un enfant peut acheter chez lui tout aussi bien qu'un autre. On est donc loyalement servi, mais cela ne suffit pas, et de loin, pour croire que le marchand agit ainsi par devoir et d'après des principes de probité ; son intérêt l'exigeait ; car il ne peut être ici question d'inclination immédiate, et l'on ne peut supposer en lui une sorte d'amour pour tous ses clients qui l'empêcherait de traiter l'un plus favorablement que l'autre. Voilà donc une action qui n'a été faite ni par devoir, ni par inclinaison immédiate, mais seulement par l'intérêt personnel" (Emmanuel Kant, fondement de la métaphysique des moeurs, p. 20 & 21). Le marchand agit conformement au devoir mais pas par devoir, par intérêt, il ne sagit donc pas d'éthique. Cette notion est conforme au sentiment commun. Une action faite par intérêt perd toute valeur éthique. Une action éthique doit être désinteressée. C'est lourd de conséquence... Par exemple, une formation peut-elle être désintéressée ? Si la réponse est non alors conformément à Emmanuel Kant on se doit de dire qu'une formation ne peut être éthique. Et si on généralise, une entreprise éthique n'a pas de sens dans la mesure où elle cherche à obtenir quelque chose. Cela met à mal tous créateurs d'éthique ou tout ce qui annonce qu'ils ont un management éthique dans le but d'avoir une reconnaissance ou une valorisation de leur action... Effectivement dans ce sens, il ne reste que peut de monde...

Pour poursuivre ce picorage préliminaire et toujours avec les modernes, il serait de bon ton de citer Max Weber pour ne pas penser que rien n'est éthique en se bas monde de l'entreprise. Dans "le savant et le politique" Max Weber introduit une distinction entre l'éthique de conviction et l'éthique de responsabilité. Les deux ne sont donc pas en opposition mais recouvrent deux réalités différentes. L'éthique de conviction, c'est le lieu de la croyance, j'obéis plutôt que je ne réfléchis. C'est la sphère des croyances, dont l'exemple de la religion est parfaite. On ne s'interroge pas sur l'existence de Dieu mais on y croit ou non. Toutes les croyances sont bonnes, la hiérarchisation n'a pas de sens absolu sauf pour celui qui croit. L'individu se soumet aux normes sans les remettre en cause, il n'est donc pas responsable. Alors que dans l'éthique de la responsabilité, on est dans le monde des faits et non pas des idées, l'individu est responsable, il doit mobiliser l'ensemble des moyens pour atteindre les objectifs légitimes. C'est le lieu de la politique et de l'action. C'est là que se situe le monde de l'entreprise. Et la formation ? Max Weber pose le problème en ces termes : "Je voudrais seulement vous poser cette simple question : comment, dans une leçon qui a pour objet l'étude des diverses formes des Etats et des Eglises ou l'histoire des religions, est-il possible d'amener d'un côté un catholique croyant et de l'autre un franc-maçon à soumettre ces phénomènes aux mêmes critères d'évaluation ? Cela est tout bonnement exclu. Et pourtant le professeur doit avoir l'ambition et même se faire un devoir d'être utile à l'un et à l'autre par ses connaissances et sa méthode... Cette science "sans présuppositions" exige de sa part rien de moins - mais également rien de plus - que le souci de reconnaître simplement que, si le cours des choses doit être expliqué sans l'intervention d'aucun de ces éléments surnaturels auxquels l'explication empirique refuse tout caractère causal, il ne peut être expliqué autrement que par la méthode que la science s'efforce d'appliquer. Et la croyant peut admettre cela sans aucune infidélité à sa foi." La formation éthique est neutre. Le formateur est neutre. Et la responsabilité est de tout mettre en oeuvre pour construire cette neutralité hors du domaine de la conviction. Max Weber est conscient que cela se traduira par un "désenchantement" mais que cela est le prix à payer pour une entreprise rationnelle. Génération désenchantée... On est bien dans le courant de la modernité. Cette démarche est en harmonie avec l'Organisation Scientifique du Travail. Par extrapolation, on peut dire que sans s'interroger sur le bien fondé de l'objectif de la formation, l'éthique de la responsabilité est de développer une obligation de moyen, mobiliser tous ses efforts pour atteindre l'objectif qui lui a été donné. Cette notion d'éthique, fait rêver bon nombre de dirigeants... encore faut-il réfléchir autour de la motivation, on parle tout particulièrement d'appétence pour la formation. Ne serait-ce pas le prix à payer du désenchantement ? Cela est une autre histoire qui fera l'objet d'une autre chronique...

L'éthique est une belle aventure, une odysée dans le monde de l'entreprise pour au final rentrer en Ithaque enrichi de son parcours, autrement dit de changer son regard sur le monde de la formation...

Sunday, December 04, 2005

L'apprentissage, une formation d'avenir ?
Cité des sciences de la Vilette, lundi 28 novembre 2005
A faire trop de conférences, on a d'agréables surprises. J'ai rencontré Jean-Marie Dusseigneur, en le prenant pour l'organisateur d'une autre conférence. Le contact était fait... et le temps que je m'aperçoive de mon erreur, j'avais déjà trouvé quelqu'un qui m'a plu. La chance des rencontres, j'étais engagé dans l'aventure. L'apprentissage avec le ministre de la cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, et le PDG de Schneider, Henri Lachmann, c'est déjà une belle affiche et en plus cela m'a permis de rencontrer la DRH de Monoprix Catherine Bjunbushian, une entreprise qui a mon affection. Que du bonheur... Enfin, sauf mon arrivée... en retard.
L'apprentissage en France est peu développé surtout si on le compare 350 000 en France 1 800 000 en Allemagne. Comment expliquer cette situation ? Selon la thèse de Claude Jean Padroni, l'origine viendrait de "l'enseignement initial des techniques" qui regroupait les inadaptés de l'éducation nationale ; et l'apprentissage était une inovation pédagogique pour personnel difficile. Difficile après de construire la fameuse "voie de l'excellence". Alors qu'est-ce qu'il y a de nouveau ? Deux choses, l'apprentissage est ouvert au niveau 1 et les grandes écoles proposent des cursus d'apprentissage. Devenir ingénieur par apprentissage, voilà qui peut donner de la valeur à la filière, même si aujourd'hui encore 85 % de apprentis le sont pour des niveaux CAP BEP. La filière d'excellence prend du sens. Et, deuxièment, le choc démographique se traduit par des besoins nouveaux. En 2006, il manquerait, selon les Agefos PME, 35 000 emplois de niveau 1. S'ils ne sont pas là, il faudra les former et comme ils sont en poste, l'apprentissage est une solution adaptée.
Jean-Louis Borloo présente un argument intéressant : un apprentissage post baccalauréat jusqu'au niveau 1, cela se traduit par un avantage comparatif signigicatif par rapport à une filière classique : pour un même poste de niveau 1, l'apprenti se présente avec 5 années d'expériences. C'est une sacrée différence. Mais surtout, l'apprentissage c'est une façon d'apprendre ce qui est le plus difficile le savoir être. Et, pour cette acquisition le meilleur moyen reste encore la pratique. Et plus tôt on acquière ces automatismes, plus ils seront ancrés durablement. Cela évite les comportements "autistes", là l'apprenti a une expérience et la possibilité de la partager avec le corps enseignants et/ou le maître de stage. C'est ce que l'on appelle l'intelligence relationnelle. Quel gain de temps que de partir avec cet acquis que tant d'entreprises essayent par la suite de réacquérir à des âges ou les acquisitions de comportement ne sont plus les mêmes. Le Ministre pouvait alors parler de "deux coups d'avance" pour les apprentis.
L'apprentissage devient un passage important pour les entreprises soit pour devenir des "entreprises citoyennes" soit, ce qui est plus intéressé pour favoriser des "formations recrutantes" . La pénurie de main d'oeuvre généralisée va se traduire à partir de 2006, par la création de filières métiers dans l'espoir de trouver un vivier. Mais les désillusions peuvent être grandes : Monoprix qui a des résultats comparativement de bonne qualité sur des filières métier très intéressantes, ne garde que 37 % de ces apprentis. Eu égard au temps passé, ne garder qu'un tiers des apprentis, cela vaut-il l'investissement ? Avec la pénurie pour les entreprises assurément, oui.
Quels sont les freins ?
Si l'on interroge les responsables de formation, la première réponse est la méconnaissance des systèmes d'apprentissage. Pour certains publics d'entreprise, l'apprentissage fait partie de la culture pour d'autres non. Comme le ministre se lance dans une campagne de communication avec Henri Lachmann comme animateur, ce point devrait rapidement faire partie du passé. Le second point est plus complexe, l'éducation nationale est un mastaudonte. "Ils n'ont pas le même temps que nous". Et c'est vrai ? L'éducation nationale a une évolution : intégrer l'entreprise dans la création des nouveaux métiers et utiliser sa compétence pédagogique pour construire une pédagogie particulière. C'est plus long, c'est culturel. A suivre...
Restait un sujet d'actualité l'apprentissage à 14 ans qui fut à peine abordé ? C'est une bonne question, pourquoi ne pas autoriser l'apprentissage pour des enfants en echec scolaire. Avec le même raisonnement, pourquoi pas 12 ans voire 10 ans ? On sent la gêne... l'argument vaut quelque soit la date. Au début du 20ième siècle, les enfants travaillaient dès 5 ans. Il faut garder en mémoire que le fait de repousser la date d'entrée dans le monde professionnel a été une avancée sociale forte. Et la lever n'est pas innocent et parler simplement d'efficacité, c'est faire peut de cas de l'histoire sociale de la France. L'école a quel objectif ? Alain Finkielkraut précisait que "l'objectif de la formation est la formation" et non l'efficacité du monde du travail. Le bon sens populaire précisait qu'il fallait mieux une tête bien faite qu'une tête bien pleine. Le débat est ouvert... et pour le compléter comment choisir à 14 ans ? Il y a sans doute une voie nouvelle a créer avec des passerelles plus fortes entre l'apprentissag et les formations classiques. En conclusion, une bonne question qui se traduit par plus d'apprentissage mais dans une véritable filière d'excelence.
Tout un chantier qui sort du ghéto de l'apprentissage pour construire un véritable outils d'acquisition des connaissance tout au long de la vie.

Thursday, November 03, 2005

Formation et développement durable
Groupe Horizon, jeudi 03 novembre 2005

Le développement durable, un interrogation qui dure : qu'est-ce qui se cache sous cette terminologie ?
Francis Karolewicz propose une définition issue de son livre "RH et développement durable, une autre vision de la performance" (EO, 2005). Enfin une définition, comme si ce pléonasme ne se satisfaisait pas à lui-même. Peut-on se développer ailleurs que dans la durée ? Un développement (évolution) sans la durée, c'est une disparition. Bon, cessons ces taquineries linguistiques pour reconnaître qu'il existe derrière les mots des idées et une vrai conception nouvelle. Encore faut-il la définir pour éviter ce que Heiddeger appelait le bavardage, parler de tout sans être sûr de parler de la même chose. Il faut donc définir les concepts, c'est dans ce sens, me semble-t-il, que Francis Karolewicz propose son travail. Proposer une définition pour engager sur un terrain le partage des idées.
"Développement durable" :
1. La logique du vivant
2. La culture de l'apprenance
3. La responsabilité sociale
4. La charte DRHD
5. Les ressources humaines
La composante la plus développée est sans doute la première. Avec un fort parfum de systémique (Edgar Morin et la méthode) Francis Karolewicz propose de comparer le développement durable à un organisme vivant. En sortant des énumérations citées, on retrouve dans la logique du vivant le fait de relier le DD à son environnement, environnement au sens large qui prend en compte l'espace concurrentiel mais aussi l'écosystème. L'environnnement est en mutation permanante, le développement durable doit évoluer en même temps que son environnement. C'est le mouvement permanant, avec l'introduction d'une subtilité. Il ne parle pas d'adaptation qui serait un référentiel extérieur mais d'ajustement qui serait une adaptation à partir d'un référentiel interne. L'étymologie me semble étrange : ajuster fait référence à ce qui est juste et donc à un étalon qui servirait de référent alors qu'adapter fait référence à un choix, à des options et plus à une dynamique interne car c'est l'entreprise qui choisit. L'entreprise adaptative semble plus un modèle d'avenir qu'un modèle à éviter... On pourrait définir cette composante comme le DD organique. S'appuyant sur un exemple animalier, Francis Karolewicz montre que l'innovation est partagée pour exister. C'est l'histoire des babouins japonnais d'Edgar Morin dans Paradigme perdu (1979). Sortons de la systémique.
La deuxième composante (en quantité de développement) était la culture de l'apprenance, que Francis Karolewicz défini comme le fait de "prendre en charge son apprentissage""sa formation"; autrement dit une autonomie de l'apprenant. Cela développe "l'employabilité cognitive". Et si on extrapole, comme nous rentrons dans la société du savoir ou de la connaissance, l'employabilité cognitive devient un critère essentiel comme l'illustre très bien Philippe Carré.
La troisième composante est la responsabilité sociale en précisant qu'il ne sagit pas là d'une seule responsabilité de l'entreprise mais aussi et c'est là la nouveauté une responsabilité des salariés. Mon sentiment est qu'il s'agit d'un invocation pieuse sans nous donner les moyens quand le relais est donné à Sarah Velozo pour expliquer les modes opératoires. Très bel enchaînement. Il est à noter que les autres composantes n'ont pas pu faute de temps être développer mais que l'on a déjà la trame ou le squellette de la définition à nous de fournir, après tout ne sommes nous pas autonomes (point 2).
Alors comment fait-on ?
Sarah Velozo nous présente un test sur une trentaine de personnes (3 promotions de 10 personnes chacune). La représentativité est faible mais elle a le mérite d'exister. Comment développer l'autonomie d'apprentissage ? En collaboration avec les Ateliers pédagogiques personnalisées d'IDF, Monoprix a mis en place des formations 1h30 par semaine sur 6 mois ce qui compte tenu des spécificités du métier (cadences, vacances, fêtes, inventaires,...) représente 30 heures. L'entreprise s'engage plus sur les méthodologies que sur des contenus : expression écrite, orale, logique,... le tout dans le cadre d'un projet personnel. Il s'agit assurement d'un projet de développement personnel de populations à basses qualifications, "hôtes", "hôtesses", les anciennes caissières, et le réassort, les anciens gondoliers. Le résultat, trop tôt mais d'ores et déjà certaines personnes des 30 sur les 14 000 hôtes et réassorts, ont pris de l'assurance. Sarah Velozo parle même de leader... L'interrogation sur cet te expérience de l'aveu même de l'intervenante le suivi. Si j'ai bien compris l'idée est de maintenir la pression sur cette investissement majeur pour la marque. Il existe la "semaine du DD" qui ressence toutes les actions engagées par chacun dans le DD. C'est exactement la méthode choisi par le Kaisen, premettre à chacun de faire publicité de ces petites innovations, cela entretien la dynamique de celui qui est acteur et par mimnétisme incite les autres à l'action. L'événemetiel est une méthode très efficace. La clé est bien dans la durée. Changer les mentalités prend du temps mais s'il s'agit d'une décision qui s'inscrit dans la durée, cela peut marcher. Belle expérience.
Béatrice de Grotte a posé une question fort intéressante. Je résume : le DD ne serait-il pas plus pour envoyer des messages à l'extérieur qu'un projet interne ? Autrement dit sorti des intentions de principes, dans la pratique au quotidien, il existe "un fossé important". C'est tout le problème, entre énnoncer une valeur et l'appliquer. C'est aussi tout le problème de la communication interne et externe. Cela conduit à deux évolutions : le marketing social au sein de l'entreprise (comme l'illustre un papier précédent) et le fait de repenser la culture de l'entreprise. La culture peut prendre différentes formes, par exemple changer le pouvoir dans l'entreprise. On parle de DD dans les entreprises parce que la direction générale a choisi cette orientation soit de communication soit de stratégie. On nous dit, il faut que la base s'exprime mais comment la ligne hiérarchique va réagir face aux premières critiques ? C'est toute la limite de l'implication, tout le monde a à s'exprimer mais ce n'est pas sûr que tout le monde veuille l'écouter. Assurément, l'avencé du DD n'est pas dans la seule libération des forces vives de l'entreprise mais un nouveau point d'équilibre entre libérer la parole des projets et orienter ces projets pour assurer leur devenir. L'avenir semble donc être dans le positionnement du curseur plus proche de l'écoute tout en conservant un besoin de direction clairement partagé. Tout un programme qui va nourrir les discussions durablement...